Ohé du château ! Interview de Mme Hantat, propriétaire du Castellas de Saint-Bonnet

Intérieur du Castellas
Photos extraites de l'article Wikipédia

Le château du Castellas, bien campé sur son rocher, domine le Val de Salindrenque de sa masse fortifiée depuis le XIème. Du moins officiellement, puisqu'on en trouve mention dans un acte notarié dès 1042. Mais le château a sans doute vu le jour avant, un ou deux siècles plus tôt, durant l'ère carolingienne. Sa présence témoigne de siècles et de siècles d'histoire. C'est dire s'il fait partie du patrimoine local. Sachant cela on est tout étonné de le voir en si bon état. Cela n'a pas toujours été le cas. Ce fut donc un plaisir pour le Grillon de rencontrer sa châtelaine, 

Mme Hantat, qui a procédé à sa restauration et qui y vit la plus grande partie de son temps.

 

Le Grillon :- Bonjour Mme Hantat, vous n'êtes pas née dans ce château. Pourquoi cet intérêt pour les vieilles pierres ?

 

Mme Hantat : - Je suis née à Angoulême. Mais Angoulême se situe aussi dans ce même territoire où on parle la langue d'Oc. J'ai toujours été passionnée par l'histoire des vieux bâtiments. Je l'étais déjà dans ma ville natale. Je m'en souviens : il y avait l'émission de P. Delagarde ˝chefs d'oeuvres en péril˝ à la télévision. Nous la regardions assidûment en famille, avec mes enfants alors étudiants.

 

Le Grillon : - Comment êtes vous venue jusqu'ici ?

 

Mme Hantat : - J'ai connu durant des vacances, Marcelle Pechagut. C'est la fille de l'ancien instituteur de Saint Bonnet de Salendrinque. On a parlé et elle m'a donné envie de venir découvrir les Cévennes et ce vieux château en ruine.

 

Le Grillon : Quand êtes vous venue ?

 

Mme Hantat : - Je suis arrivée en Cévennes à l'automne 1973. J'ai vu ce qui restait du château. Pas de toitures, pas de portes ni de fenêtres closes. Des arbres et des ronces. Le bâtiment était devenu le domaine des vaches et des moutons. Mais ce fut un coup de cœur. J'ai acheté la ruine en 1973 et j'ai commencé la restauration en 1974. J'ai commencé à nettoyer moi-même pour préparer le terrain : les vieilles poutres, le plâtre, les ronces envahissantes... Le château avait été transformé en ferme et en magnanerie depuis la Révolution Française où il a été fut vendu comme Bien National. Depuis, plusieurs fermiers s'y sont succédés. Les pièces étaient divisées on y avait installé des clèdes en roseau sur lesquelles étaient élevés les vers à soie, nourris de feuilles de muriers. Il y avait de nombreux de mûriers autour du château. Le fermier, M. Deshons de 1900 à 1973, avait mis des vaches dans la première salle voûtée. Il a fallu démolir les clèdes, consolider des arcs de murs pour éviter l'effondrement des plafonds. Avant que je reprenne le château c'était un pasteur qui en avait la propriété, puis Madame De Barry. Elle a bénéficié en 1982 d'une donation de la chapelle aux volets qui furent roses et sont jaunes aujourd'hui. Il s'y trouve une superbe voûte et des fenêtres romanes.

 

(la suite dans la version papier du Grillon de mars 2013)

 

Entretien fictif avec Pierre Laporte dit Rolland (du Désert)

« Que Dieu se montre seulement  Et l’on verra dans un moment  Abandonner la place ;  Le camp des ennemis épars,  Epouvanté, de toutes parts  Fuira devant sa face.  On verra tout ce camp s’enfuir  Comme l’on voit s’évanouir ...
« Que Dieu se montre seulement Et l’on verra dans un moment Abandonner la place ; Le camp des ennemis épars, Epouvanté, de toutes parts Fuira devant sa face. On verra tout ce camp s’enfuir Comme l’on voit s’évanouir ...

(Archives du Grillon de Novembre 2012 - illustration issue du site du Musée du Désert à Mialet)

 

Furieux de voir Louis XIV s'exprimer dans nos colonnes, Rolland, le fameux camisard, a exigé un droit de réponse. Lasalle est vraiment un drôle d'endroit. Y aurait-il des fantômes ? Ne laissez pas vos enfants sortir seuls le soir... Soyez prudents... Si vous rencontrez un fantôme, parlez-lui gentiment.

 

Le Grillon

Merci Monsieur Laporte de nous accorder cet entretien. Mais comment doit-on vous appeler, Laporte ou Rolland ?

 

Rolland

Rolland bien sûr !

 

Le Grillon

Et pourquoi ce nom ?

 

Rolland

Vieille histoire ! Les historiens en auront écrit des pages et des pages sur le choix de mon pseudonyme ! Et bien voyez-vous, parmi toutes leurs explications, celle que je préfère, c'est celle qui fait référence aux "Rolling stones" : la "pierre roulante de la rivière du Gardon" ! Mais il en est de mon pseudonyme comme du reste, c'est une inspiration divine... Ne cherchez pas davantage.

 

Le Grillon

Comment vous venaient ces inspirations ?

 

Rolland

Vous savez, il est difficile dans cet état d'être assez détaché pour savoir ce qui se passe exactement mais l'essentiel est le message qui vous est transmis.

 

Le Grillon :

A notre époque cela paraît très étrange pourtant et nos lecteurs aimeraient bien savoir.

 

Rolland

Demandez à d'Aigallier (le baron de St Félix de Pailhères) il a très bien décrit cela dans ses mémoires et, même si ce spectacle l'agaçait beaucoup, il en a été lui-même témoin1. D'ailleurs
Elie Marion, qui était là un jour où je fus pris d'une inspiration, l'a très bien raconté : "l'esprit lui dit qu'il ne resterait qu'un petit nombre d'entre eux... et qu'ils seraient dispersés mais le temps viendrait... que Dieu susciterait avec le résidu... choses grandes et merveilleuses, que tout plierait devant eux et qu'ils répandraient sur tout la France".

 

Le Grillon

Pourquoi vous appelait-on les "camisards" ?

 

Rolland

"Attroupé", "rebelles", "coquins", "scélérats", "fanatiques", "osards"… on nous a traité de tous les noms du côté du pouvoir, mais entre nous, nous nous appelions "les enfants de Dieu" parce que ce que nous voulions c'était simplement rendre à Dieu ce qui lui était dû.

 

Le Grillon

Vous avez commencé à réunir des troupes à l'automne 1702 tout près de Lasalle ?

 

Rolland

Entre St Hippolyte et Alès, avec Jean Cavalier et Abraham Mazel, nous avons attaqué des garnisons et des églises et tenu des assemblées au Désert. J'ai participé à l'occupation de Sauve et aux attaques de petits châteaux qui abritaient des garnisons (Mandajors, St Félix...). Plus tard, dans l'hiver 1703, nous avons intercepté les courriers militaires et les muletiers catholiques du haut Gévaudan sur la route royale (corniche des Cévennes). Avec Castanet, le chef-camisard de l'Aigoual, nous avons exécuté les habitants (catholiques) de Fraissinet de Fourque qui s'étaient réfugiés dans l'église.

 

Le Grillon

Et bien dites donc ! C'était l'Esprit qui vous commandait ça ?

 

Rolland

Bien sur ! Quand l'Esprit nous commandait de ne rien faire nous cessions toute activité.

 

Le Grillon

Et ensuite ?

 

Rolland

On est parti pour attaquer Sumène (à majorité catholique) mais sans y parvenir alors nous sommes allés au Vigan.

 

Le Grillon

Il paraît qu'au passage, sur la route de Ganges, vous avez massacré 25 recrues qui s'étaient engagées dans la marine et partaient vers l'Atlantique ?

 

Rolland

Peut-être, je ne sais plus. Mais arrivés à Ganges, nous avons été accueillis à bras ouverts et nous sommes allés brûler les églises et presbytères des environs.

 

Le Grillon

Ça n'a pas été aussi facile à Pompignan ?

 

Rolland

"A Pompignan ils sont méchands" tout le monde sait ça ! Montrevel nous a encerclé et nous nous sommes battus avec ses "Miquelets" dans les bois de Monnier. Près de 300 d'entre nous ont
été tués !

 

Le Grillon

Alors qu'avez-vous fait ?

 

Rolland

Nous nous sommes repliés du côté du pic de Montvaillant, au-dessus de la route de Lasalle à Calviac. Là, nous avions des abris sûrs qui nous servaient de greniers et d'arsenaux, d'hôpitaux de fortune et de lieux de culte (Laudernet, Les Ayres, Mas Pagès...). Pendant plusieurs mois nous n'en sommes pas beaucoup sortis. D'ailleurs, la plupart d'entre nous devaient aller s'occuper de leurs fermes et de leurs récoltes. Mais le brigadier Julien a dragonné la paroisse de Mialet et déporté ses habitants. Mon père et mon frère ont été emprisonnés. Alors nous avons repris l'action militaire et les assemblées religieuses. Le 26 août à Bijour au sud de Thoiras nous avons été cernés par les troupes. J'ai ordonné qu'on poursuive le service religieux jusqu'à la fin et, avant la dispersion, chaque homme a pris une branche qu'il tenait sur l'épaule comme un fusil et nous sommes partis tranquillement. Les soldats n'ont pas osé nous approcher !

 

Le Grillon

Mais en septembre le "grand brûlement des Cévennes" a commencé ?

 

Rolland

Ce maudit Montrevel et ses milices se sont attaqués aux maisons de ceux qui nous abritaient dans les hautes Cévennes (entre St Etienne Vallée francaise, Le Pont de Montvert et Florac) et ils ont commencé à tout détruire systématiquement !

 

Le Grillon

Et qu'avez-vous fait ?

 

Rolland

Pour leur monter ce dont nous étions capables nous avons attaqué avec Jouany les paroisses catholiques de Ste Cécile d'Andorge et St Julien des points. Nous étions 8 à 900 le 10 octobre devant Ste Cécile et nous avons détruit 400 maisons. Le lendemain c'était le tour de St Julien.

 

Le Grillon

Et, Montrevel s'est arrêté ?

 

Rolland

Non, il a continué.

 

Le Grillon

Et vous ?

 

Rolland

Avec Elie Marion et Antoine Atger (Lavalette) nous avions décidé d'attaquer les milices et les royaux en faisant appel à tous les camisards volontaires : plus de 600 hommes réunis au coeur de la Vallée Française. Mais Marion a reçu inspiration divine, qui lui a commandé de ne rien faire et nous avons renoncé. Les gens n'étaient pas contents et quelques lâches ont même tenté de nous dénoncer aux autorités sous prétexte que nous ne faisions rien pour faire cesser les destructions.

 

Le Grillon

Donc Montrevel a pu continuer et dans les paroisses concernées les habitants ont été regroupés dans les bourgs sans pouvoir rentrer chez eux, sans ressources ni maisons ?

 

Rolland

Oui, mais en janvier nous avons repris les hostilités. Avec 150 hommes nous nous sommes embusqués au pont de Vallongue, sur la route de Lasalle à l'Estréchure : quand les troupes sont arrivées à la hauteur des maisons, près du pont, nous avons attaqué et beaucoup ont été touchés. Près de 150 soldats ont été éliminés mais surtout nous avons pris des armes, des uniformes, des chevaux et de l'argent. Quelques soldats ont fui vers le col du Mercou pour se réfugier à Lasalle, d'autres sont allés au château du Rocou où nous les avons encerclés (sans succès). Alors nous sommes allés au château de Valescure et de là, à St Hippolyte du fort et nous avons brûlé l'église.

 

Le Grillon

Et puis on n'entend plus parler de vous pendant quelques temps ?

 

Rolland

Oui j'ai quitté la région de Thoiras pour les hautes Cévennes.

 

Le Grillon

Les hautes Cévennes étaient exsangues en effet : des centaines de galériens, des milliers de prisonniers, des milliers de morts, insécurité et brigandages qui règnaient sur les routes...

 

Rolland

Aussi nous avons décidé de réagir et d'attaquer la troupe qui escortait Paul Viala, subdélégué de St Jean du Gard. C'est la troisième embuscade qui avait lieu au Plan de Fonmort depuis le début de la guerre : ils étaient plusieurs centaines (500 à 700) qui allaient vers le Pont de Montvert avec des fonds et du ravitaillement. Nous en avons tué une centaine. Mais quand nous sommes arrivés aux Ayres (près de St Germain de Calberte) pour nous partager le butin, nous avons appris que Cavalier s'était rendu. Le 18 mai je l'ai rejoint à Sauve et j'ai accepté le principe d'une trève. Nous devions tous nous rejoindre à Calvisson pour négocier. Pendant ce temps je suis allé à Laudernet où plusieurs délégations ont tenté de me persuader de me rendre. Quand j'ai revu Cavalier à Luziers, j'ai définitivement refusé de renoncer et plusieurs parmi les chefs ont refusé la reddition comme moi.

 

Le Grillon

Mais les troupes ont failli vous capturer à ce moment tout près de Lasalle ?

 

Rolland

C'était le 7 juin. J'était avec Marthe de Cornély au château de Prades quand un détachement nous a surpris. Mais j'ai réussi à m'échapper, sans même avoir pu prendre le temps de m'habiller !

 

Le Grillon

Les négociations étaient rompues ?

 

Rolland

Non, il y a encore eu une réunion à Durfort : plus de mille personnes étaient là, dont deux cent des nôtres. Mais il n'y a pas eu moyen de s'entendre.

 

Le Grillon

Et alors ?

 

Rolland

Et bien vous savez la suite. J'étais allé rejoindre Marthe à Castelnau-Valence et faire aussi une assemblée, quand nous avons été trahis par l'un des "nôtres". Je n'ai pas pu m'échapper cette fois-là.

 

Le Grillon

Vous avez été tué d'une balle de fusil mais vos compagnons ont été longuement torturés à Nîmes avant de périr.

 

Rolland

Oui. Et ils ont embaumé mon corps pour le traîner jusqu'à Nîmes et montrer à toute la ville que j'étais bien mort.

 

Le Grillon

C'est depuis que vous êtes devenue une légende.

 

Rolland

Et c'est pour ça que Jean-Paul Chabrol m'appelle "l'insoumis" 2...

Michelle Sabatier

 

1 Le Baron d'Aigallier (protestant, seigneur de St Félix de Pailhères) décrit une scène de prophétie qui se déroule dans la chambre qu'il occupe avec sa mère à Calvison pendant une négociation menée avec Rolland et le maréchal de Villars pour obtenir la réddition des Camisards : "Tout à coup cet homme qui venait d'entrer après quelques mouvements convulsifs ou qui paraissaient tels, se laissa tomber sur le pavé avec armes et bagages. Il occupa la moitié de la chambre où il resta trois bonnes heures à faire des contorsions et des mouvements épouvantables, se tenant à
lui-même des discours, comme s'il avait été ravi au ciel, d'où il présageait beaucoup de malheurs sur la terre."

2Toutes les informations rapportées ici viennent de l'ouvrage de Jean-Paul Chabrol : "Rolland l'insoumis" publié en 2012 aux Editions Alcide. Outre ces quelques aspects très factuels, et centrés sur les activités de Rolland autour de Lasalle et Thoiras, cet ouvrage contient des analyses très intéressantes sur bien des aspects méconnus ou rendus inaudibles par l'écho de la "légende camisarde". En outre, il a l'élégance de n'avoir que 142 pages et l'Association des Amis de la bibliothèque le met à votre disposition.

 

La reliure d'Etienne Saix

http://livres-anciens-rares.blogspot.fr/2011/12/magnifique-reliure-art-nouveau-signee-h.html
Reliure Art Nouveau

Au moment où paraît notre livre ˝ Fous des Cévennes ˝ - Portraits du canton de Lasalle, il nous a semblé intéressant de mieux faire connaître le travail de la reliure. Nous remercions M. Saix de nous en donner l'occasion. La reliure, c'est l'opération d'assemblage des feuilles imprimées d'un ouvrage pour donner à celui-ci sa forme définitive, avec une couverture rigide ou souple pour le parer et le protéger. La reliure a vu son apparition lorsque les divers feuillets d'inscriptions abandonnèrent la forme du rouleau qui était fait de bandes de parchemins, ou de papyrus enroulés autour d'un bâtonnet. Les livres étaient alors constitués et sont toujours constitués de feuillets réunis en cahiers et protégés par des couvertures. Ces couvertures étant elles mêmes décorées grâce aux diverses techniques de la dorure. Bref historique Ce passage du rouleau au livre se situe entre le II° et le VI° siècle après Jésus-Christ. Au fil des siècles de nombreux essais et des recherches techniques permirent de mieux protéger et donc de conserver la mémoire des évènements et autres, à travers les écrits. Au début de l'ère chrétienne, les écritures étaient réalisées directement sur des peaux de bêtes découpées en rectangle puis cousues entre elles et enroulées sur de fin rouleaux de bois. Plus tard les morceaux de peaux furent pliés sur eux mêmes puis encore plus tard, ces peaux pliées furent fendues d'un côté et réunies par une couture de l'autre côté. Ce qui conduisit à la forme actuelle du livre tel que nous la connaissons . Au Moyen Age, l'influence et le travail des moines furent essentiels pour la protection des ouvrages. Ils firent eux-mêmes les reliures de leurs manuscrits en cousant les feuillets de parchemin sur des nerfs de bœuf et en les protégeant sous des couvertures faites de planchettes de bois. Certains ouvrages, particulièrement importants étaient recouverts d'étoffes, elles mêmes décorées de motifs d'or ou d'argent. Vers le XIII° siècle, le nombre de manuscrits augmenta considérablement à la suite des premières importations en Europe, par les Arabes, de papier de chiffon. Ces nouveaux feuillets cousus ensemble furent alors recouvert de parchemin, de peaux de truies ou de vélin. L'art de la reliure eut alors un nouvel essor avec en 1436 la découverte de l'imprimerie. Les matériaux utilisés changèrent beaucoup : les ais de bois furent remplacés par des cartons ensuite recouverts par du cuir, les nerfs de bœuf, sur lesquels étaient cousus les cahiers, par des fils de chanvre tressés. Les livres devenant trop nombreux pour être rangés à plat, c'est vers le XVI° siècle que l'on prit l'habitude de les positionner côte à côte dans les bibliothèques. A l'époque révolutionnaire, apparurent les séries sur des papiers pas toujours de bonne qualité et les reliure ne furent pas soignées ( cartons abimés, feuilles de papier journal, etc...). Après cette époque agitée, le goût des belles reliures revint en force, en particulier avec des dos et des plats richement décorés. Le difficile travail de la reliure puis de la dorure ( qui en est son complément indispensable ), la richesse des divers papiers utilisés, des cuirs de chèvres, moutons, buffles, etc..., de l'or pour les motifs extérieurs, les nombreuses heures de travail pour un ouvrage, entraînèrent des coûts élevés à chaque opération, ce qui est vrai encore aujourd'hui. La reliure est une activité chère et donc de luxe. C'est pourquoi au fil des siècles, les bibliophiles étaient les puissants, les riches et les dirigeants de la royauté, seuls financièrement aptes à payer et à se constituer de somptueuses bibliothèques. On peut mentionner, à titre d'exemple, les milliers de volumes du Duc de Bourgogne. Nous rappellerons ici que les collections les plus connues, en France, furent celles de Louis XII, François I°, ensuite à l'époque d'Henri Il — Catherine de Médicis — Diane de Poitiers, puis Henri III et Henri IV. Au XVII° siècle, il convient de citer Louis XIII, puis Louis XIV qui aidèrent les métiers d'art et permirent la constitution d'importantes collections chez Richelieu, Mazarin, Colbert et bien entendu Fouquet. Les techniques de la reliure Sans trop entrer dans les détails, nous ne signalerons que les types de reliure les plus courants aujourd'hui et les principales étapes de fabrication. Le Bradel : C'est une forme de reliure dont le cartonnage léger est relié au corps de l'ouvrage par une mousseline fine collée. Il s'agit techniquement d'un emboitage car le livre et sa couverture, très souvent en toile, sont préparés séparément puis assemblés par collage. Le Demi-cuir : C'est un ouvrage dont le dos et les coins sont en cuir associés à des papiers de couleur à préparation mécanique ou marbrés à la main. Ces derniers de bien meilleure qualité sont évidemment beaucoup plus chers . Ces ouvrages comportent des nerfs qui donnent du relief aux dos et aident à positionner les titres ( titre de l'ouvrage et nom de l'auteur ) et les divers décors réalisés avec des fers à dorer. Le Pleine peau : C'est à peu prés le même type de reliure que précédemment mais l'ensemble est recouvert de cuir ; les papiers de couleur étant alors réservés aux pages de garde à l'intérieur du livre . Bien entendu, à partir de ces trois thèmes de nombreuses variations peuvent être effectuées, avec par exemple des figures en mosaïque. Le travail du relieur comporte de nombreuses étapes et peut prendre, en fonction de l'état du livre et de la dextérité du relieur, une vingtaine d'heures ou nettement plus. Et ceci sans compter les divers temps de séchage. Les étapes, dans l'ordre, sont les suivantes : - débrochage du livre et réparation des feuillets abimés ; Après un passage sous presse, grecquage ( opération qui consiste à l'aide d'une scie à tracer des traits dans le futur dos du livre pour permettre de positionner les nerfs et de pratiquer la couture) - la couture sur nerfs ( méthode ancienne utilisée pour des livres très anciens ou de luxe),sur rubans (en particulier pour les Bradels) ou à la grecque( où les ficelles sont entièrement logées dans les traits de scie, c'est la méthode la plus courante) La taille et la fixation des cartons devant, entre autre, participer à la rigidité de l'ouvrage ; - diverses étapes consistant à donner au livre sa forme définitive la couvrure en cuir. Le livre terminé peut être protégé par un étui ou un coffret.

Etienne Saix

 

Archives (texte paru dans le Grillon en décembre 2012)